top of page
Search
  • Writer's pictureDiane Mesnier

Dépression prénatale : «Je ne me reconnaissais plus»



Quand Britney Spears a annoncé qu’elle attendait son troisième enfant, elle a révélé avoir souffert de dépression prénatale durant ses deux précédentes grossesses. Moins connue que la dépression post-partum, elle mérite pourtant une attention toute aussi particulière. Décryptage.



13 mars 2020, alors que le monde s’apprête à entrer en confinement, Diane apprend sa grossesse. Cette nouvelle provoque en elle un sentiment auquel elle ne s’attendait pas. «J’ai immédiatement eu peur que tout se passe mal» confie cette psychologue expatriée au Pays-Bas. Gagnée par la fatigue, elle perd l’appétit et ressent une grande tristesse. «J’étais très nauséeuse, j’avais des sautes d’humeur assez violentes. J’étais triste ou énervée sans raison», se souvient-elle. Privée de ses activités habituelles en raison de la pandémie, elle manque de ressource pour s’évader. «Rien ne me rendait joyeuse. J'avais très souvent envie d’aller au lit vers 17 heures et je n’avais pas la motivation pour en sortir. Je ne me reconnaissais plus.»

Pendant cette période, Diane continue de parler en ligne à sa psychologue qui l’alerte sur son état et met rapidement des mots sur ce ressenti, elle traverse une dépression prénatale. Un événement traumatique survenu trois mois auparavant plane sur son début de grossesse. «J’ai fait une fausse-couche hémorragique à onze semaines de grossesse. La prise en charge a été compliquée et j’ai énormément souffert physiquement. J’avais une immense peur que cela recommence et de souffrir à nouveau», confie-t-elle. Elle réalise une échographie précoce pour se rassurer mais garde une angoisse constante jusqu’à la fin du premier trimestre. «Je me demandais toujours si ce que je ressentais était normal. Dès que je me réveillais sans nausée ou pas comme d’habitude. Je craignais que la grossesse ne s'arrête.» Si son état dépressif s’est atténué au début du quatrième mois, elle a gardé une forme d'inquiétude constante tout au long de sa grossesse. «Chaque jour, je me demandais si j’avais senti bouger mon enfant et j’avais du mal à rationaliser.»


Qu’est-ce que la dépression prénatale ?

«La dépression prénatale est un ensemble de symptômes dépressifs qui apparaissent au cours de la grossesse, soit dès le début, soit au cours de la grossesse», explique Claire Dahan, psychologue clinicienne. Selon cette spécialiste de la périnatalité, les changements d’humeur, troubles du sommeil, fatigue sont des symptômes courant pendant la grossesse. Cependant, la vigilance doit s’accroître quand c’est accompagné de stress intense et d’angoisse. «La perte d'intérêt, de plaisir, la dévalorisation, la culpabilité, les idées noires, une trop grosse perte d’appétit et une tristesse constante avec beaucoup de pleurs doivent alerter. Ce n’est pas tant la nature des symptômes qu’il faut regarder, mais leur intensité et leur fréquence. Car si c’est normal d’être chamboulée pendant sa grossesse, une tristesse intense et des angoisses massives doivent nous interpeller.»


Connaît-on les causes de la dépression prénatale ?

Il existe plusieurs causes à la dépression prénatale. Tout d’abord elle peut être liée à un événement traumatisant. «Certaines causes sont liées à la grossesse tels des menaces d’accouchements prématurés, une hospitalisation, une grossesse pathologique, des antécédents de fausse-couche et d’enfants morts-nés», énumère Claire Dahan. Mais cela peut aussi être la perte d’un proche pendant cette période, la rupture de lien avec la mère ou une relation conflictuelle. «La grossesse, en particulier la première, renvoie à la première mère que l’on a connue, c'est-à-dire la nôtre.» La psychologue ajoute qu’il existe aussi des facteurs de risque comme la précarité, une séparation avec le conjoint, l’isolement.

L’autre cause peut aussi être la pression devant l’injonction à la perfection. La peur de ne pas être «une bonne mère» est un sentiment que Claire Dahan observe énormément. Elle ajoute que tout simplement la peur de la douleur de l’accouchement ou d’une perte de liberté à l’arrivée d'un enfant est aussi fréquente, soulignant l’ambivalence autour du désir d’enfant.

Elle reçoit aussi beaucoup de femmes en parcours de PMA qui ont, par la difficulté des soins et le temps passé, «surinvesti» leur grossesse. «Elles culpabilisent d’autant plus qu’elles se sentent "pas contentes" alors que les traitements ont enfin marché et que la grossesse tant attendue est arrivée.» Sans compter que les grossesses dans un parcours de PMA sont des grossesses extra-suivies donc provoque «un climat anxiogène, plus propice à des troubles dépressifs.»


Un sujet encore tabou

Quelle que soit la cause, cela nécessite un diagnostic fin et surtout une grande écoute de la part des professionnels de santé. Pourtant, dans une société qui survalorise la maternité et enferme volontiers les femmes enceintes dans une injonction au bonheur, à la plénitude et à l'épanouissement, la dépression prénatale reste un tabou. «Même s’il y a eu une prise de conscience ces dernières années, grâce notamment à la libération de la parole sur les questions de la dépression post-partum, la dépression prénatale reste moins abordée» note Elise Marcende, présidente de Maman Blues. L’association qui a vu le jour en 2003, avait pour objectif de mettre en lien des femmes et leur apporter des ressources et des informations. L’idée est d’offrir à ces femmes un espace bienveillant au sein duquel elles peuvent confier qu’elles éprouvent des regrets et des difficultés, sans jugement ou remarques malveillantes. «Ce qui se dit sur ces forums vient un peu égratigner la belle image de la maternité où tout est beau et le bonheur sans faille.» Un soutien que de nombreuses femmes ne trouvent pas lors des rendevous obligatoires qui jalonnent la grossesse.


Une dépression prénatale peut-elle provoquer une dépression postnatale ?


Selon Claire Dahan, la dépression prénatale peut être un facteur de risque pour les dépressions post-partum. «C’est d’autant plus important d’en parler même à des proches car cela permet de se rendre compte que beaucoup de personnes sont concernées. La culpabilité étant une composante majeure de la dépression, en parler à d’autres et se rendre qu’on n’est pas la seule personne à ressentir une tempête émotionnelle, permet de déculpabiliser et de mieux accepter ses émotions.»

La psychologue rappelle aussi qu’il existe des techniques d'hypnose, de la méditation, de la sophrologie, de l’EMDR (quand antécédents traumatiques) qui aident beaucoup. Lorsque la dépression est sévère et que les prises en charge psychothérapeutiques ne fonctionnent pas, le médecin peut décider de mettre en place un traitement médicamenteux.


Amandine SEGUIN


Voir article complet sur Elle.fr


20 views0 comments

Recent Posts

See All
bottom of page